Dans cet épisode, Alternatives rencontre des habitants de Bordeaux qui ont décidé d’installer chez eux, en plein centre-ville, des toilettes sèches.
- #Transition énergétique et écologique
Ecoutez l'épisode
Retrouvez ici le début de cet épisode et rendez-vous sur vos plateformes pour écouter et vous abonner au podcast. Bonne écoute !
Des toilettes sèches en milieu urbain
C’est une initiative lancée par l’association La Fumainerie, à Bordeaux : installer des toilettes sèches chez des particuliers et assurer la collecte à domicile, avec un circuit de revalorisation des matières récupérées. Cette expérimentation de toilettes sèches en milieu urbain a duré deux ans, de 2020 à 2022 dans l’agglomération bordelaise. Plusieurs participants, comme Aude et Laurent, ont été convaincus. Dans cet épisode d’Alternatives, Aude et Laurent racontent comment s’est passée l’installation, les contraintes rencontrées au début, et, surtout, leur prise de conscience de l’économie d’eau réalisée. Ambre Diazabakana, co-fondatrice de l’association la Fumainerie, explique les enjeux cachés (dont la pollution des milieux aquatiques) autour de cette économie d’eau potable.
Aude et Laurent, nous sommes au cœur de Bordeaux, à quelques mètres de la gare Saint-Jean, et vous avez décidé, en plein centre-ville, de passer aux toilettes sèches. Est-ce que vous pouvez nous raconter comment ça s’est passé ?
Aude : « C’était un vieux rêve… [rires]. C’était un peu un rêve, une utopie, ça ne paraissait pas trop accessible en effet, ici, en plein cœur de Bordeaux, d’être dans ce type de projet. Et en fait, c’est nos idées, nos valeurs, nos rêves et la lecture d’un article sur la Fumainerie qui ont fait que, quasiment immédiatement, on a adhéré au projet. On en a parlé en famille et tout le monde était assez d’accord. »
Laurent : « Et après c’était surtout l’idée de ne plus utiliser d’eau potable, dans laquelle on allait polluer, mettre nos excréments. »
Comment s’est passée l’installation ? Là, vos toilettes, dans votre échoppe, une maison typiquement bordelaise, on y accède en passant par la cuisine. Donc comment s’est passée l’installation concrètement ?
Laurent : « Concrètement, nous avons démonté nos toilettes à eau, le plus simplement possible, remis un bouchon, vidé l’eau. On les a enlevé, et après la Fumainerie nous a donné de nouvelles toilettes sèches que l’on a installées le plus simplement du monde. »
Aude : « Ça s’est fait en dix minutes chrono. En effet le tuyau a été débranché. On a retiré les toilettes. Ça a été l’occasion d’un beau ménage. Et après on a installé le bac, la structure en bois avec les bacs qui récupèrent nos matières fécales et notre urine. »
Vous pouvez nous expliquer comment ça fonctionne au quotidien ?
Laurent : « Au quotidien, c’est un bac en bois. C’est des toilettes normales, avec une cuvette qui se lève normalement. Sauf qu’il y a deux espaces : un espace où va directement le fumain. Et un espace en céramique qui récupère notre urine. L’urine est déversée dans un bidon. Et tout ce qui est fumain est déversé dans une caisse. »
Ce que vous appelez fumain, ce sont les matières fécales ?
Laurent : « C’est ça. »
Autre sujet sensible : il faut bien les vider, ces toilettes sèches ?
Laurent : « Nous allons à la Fumainerie : il y a une application sur laquelle nous nous inscrivons. Et tous les soirs entre 18 et 19 heures, la Fumainerie, avec leur vélo cargo électrique, passe récupérer le bidon plein d’urine et la caisse. Et nous donne un autre bidon et une autre caisse. Si jamais il y a une urgence, on peut toujours appeler la Fumainerie, parce que le bidon est plein, qu’on a accueilli de la famille ou des amis. Donc, du coup, ils peuvent ramener plus tôt un autre bidon ou une autre caisse. Ça se fait de manière très simple et très bien. »
© DR
Pollution des milieux aquatiques
Aude et Laurent se sont fait accompagner par la Fumainerie. Cette association, fondée en 2019, a lancé en 2020 une expérimentation pour installer des toilettes sèches chez des particuliers dans l’agglomération bordelaise. Ambre Diazabakana est la co-fondatrice de l’association.
Ambre Diazabakana : « Il faut savoir que, en moyenne, une chasse d’eau c’est entre 3 à 9 litres d’eau potable consommés à chaque fois que nous appuyons sur nos toilettes. Et cette eau ne va servir effectivement qu’à transporter les matières jusqu’à la station d’épuration, où elle devra ensuite refaire l’objet d’un retraitement pour ensuite être renvoyée dans le milieu aquatique, puis renvoyée dans un système de potabilisation pour être reconsommée par les ménages. »
Donc l’objet de la Fumainerie, c’est d’éviter ce gaspillage de l’eau potable ?
« Exactement mais pas seulement. Quand on a lancé l’association fin 2018, quand on a commencé les réflexions, on avait cet enjeu de préservation et d’économie d’eau potable qui était un peu l’élément qui nous guidait, qui nous drivait et qui motivait notre réflexion. Et puis en creusant le sujet, en devant expert de l’assainissement, on s’est rendu compte que le principal enjeu de notre assainissement moderne et collectif c’était la pollution des milieux aquatiques par l’ensemble des nutriments et des éléments pathogènes que nous renvoyons dans le tout-à-l’égout et qui ne sont que partiellement traités en station d’épuration. »
Et la particularité de la Fumainerie, c’est que l’expérimentation est menée en milieu urbain, c’est-à-dire en plein centre-ville.
« Tout-à-fait. On a vraiment souhaité, finalement, déconstruire pleins d’idées reçues que l’on se fait sur l’assainissement écologique et sur les toilettes sèches en démontrant qu’il était possible, sur un plan technique, déjà, de disposer de toilettes sèches et d’utiliser des toilettes sèches dans des appartements, raccordés au tout-à-l’égout mais sans jardin, en plein cœur d’un centre urbain dense. »
Les intervenants
La Fumainerie
L’expérimentation d’installation de toilettes sèches à domicile est terminée : elle a permis à la Fumainerie de recueillir de nombreuses données sur la faisabilité technique du projet, mais aussi son acceptabilité sociale et sa pérennité économique. La Fumainerie partage son expérience et conseille collectivités, organismes et particuliers qui voudraient franchir le pas.
Comment se passe la transition écologique en Nouvelle-Aquitaine ? Le podcast Alternatives donne la parole à des habitantes et habitants de la Région qui ont choisi de changer leurs habitudes pour l’environnement. Quelles ont été leurs difficultés ? Quels sont leurs conseils ? Quelles associations ou organismes les ont accompagnés ? Ecoutez leurs témoignages et différentes initiatives dans Alternatives, le podcast de celles et ceux qui font au quotidien la transition écologique en Nouvelle-Aquitaine.