Pour son nouveau périple à pied, à la découverte de la Nouvelle-Aquitaine, Olivier Bleys s'est rendu à Bressuire, entre bocage, coulée verte et chateau.
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© Olivier Bleys
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Poitiers a son marais, Mont-de-Marsan a sa pinède et l’on pourrait écrire que Bressuire a son bocage. Ce que le Grand Robert définit comme un "paysage caractéristique de l’Ouest de la France, formé de prés clos par des levées de terre plantées d’arbres", fait la fierté des gens d’ici. Il était donc tout naturel que la communauté d’agglomération, née de la fusion de Bressuire avec des bourgades alentour (Boismé, Moncoutant, Mauléon…) prît le nom de "Pays du bocage Bressuirais".
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Même le grand espace d’activités au nord-est de la ville s’appelle Bocapôle. Sous cette enseigne futuriste logent très à l’aise un auditorium, une halle d’exposition, des salles de spectacle et de congrès, le tout bordé de pelouses coupées de haies qui s’inspirent, bien sûr, des bordures agricoles.
Dans le bocage, m’a-t-on confié, un grand respect est porté à la nature : les prairies sont laissées en pâturage, on entretient régulièrement les haies. Cette "gestion ancestrale" maintient un paysage d’une grande fraîcheur qu’on peut apprécier, par exemple, le long des "voies vertes" aménagées dans la région. Elles recyclent, pour la plupart, d’anciennes voies ferrées et des chemins de halage. Celle de Bressuire à Parthenay permet de traverser le bois de Theil, d’approcher le château de la Chenullière et le viaduc de Chanteloup.
La coulée verte
Dans Bressuire même, une "coulée verte" accueille mes premiers pas, et ceux de Julie qui m’accompagne. Son tracé astucieux aide à déniaiser le touriste qui ne connaît rien du pays.
Suivant la rivière du Dolo sur une poignée de kilomètres, ce sentier relie les sites majeurs du vieux Bressuire, tout en initiant le visiteur à l’histoire tourmentée de la région.
Ce n’est pas un hasard, en effet, si la bourgade compte peu de bâtiments antérieurs au XVIIe siècle, et si ceux qui subsistent sont parfois à l’état de décombres. Bressuire est l’un des théâtres de la guerre de Vendée, laquelle opposa royalistes et républicains à l’époque de la Révolution. Une antique construction, le moulin de Cornet, se souvient même de la toute première révolte anti-républicaine, en août 1792. Hélas, le moulin est introuvable. Nous l’avons cherché dans les bois, au milieu des maisons, au bord de routes et de voies ferrées… en vain.
La guerre de Vendée est bien loin, et ce sont des paysages tout différents que sillonne aujourd’hui la coulée verte.
Le Verger des sculpteurs
Nous l’avons abordée par le « verger de sculpteurs », une jolie exposition en plein air d’œuvres monumentales, en pierre ou en bois, qui couvre tout un flanc de colline. C’est aussi une galerie de pommiers, puisque chaque arbre près des sculptures mentionne une variété de fruit, en même temps que le nom de l’artiste.
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Là où nous sommes se situait jadis la seule entrée de Bressuire, du côté ouest. De cette époque témoignent encore un gond de porte pris dans la maçonnerie d’une vieille maison, et la précieuse chapelle Saint-Cyprien, datée du Xe siècle. Hélas, elle est fermée.
Nos photos montrent un château. Difficile de passer à côté : édifiée au XIe siècle sur un promontoire rocheux qu’elle recouvre entièrement, l’ancienne place forte est le point saillant du paysage, l’accroche naturelle du regard depuis la vallée.
C’est une forteresse en ruines, mais dotée de beaux restes : Au centre se trouve un logis néo-gothique, ancienne demeure de la famille Beaumont, inhabitée aujourd’hui et qui sert à des activités culturelles : un salon de sculptures en mars, un salon de peintures en mai. Dans le prolongement vient une esplanade, l’un des rares sites élevés de Bressuire, qui détient le panorama le plus fameux de la ville.
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Le jour de notre visite, des pompiers ont tendu des cordes du sommet des fortifications jusqu’aux douves en contrebas. Pendant leurs évolutions aériennes, je songe aux assauts menés contre ces mêmes remparts, lors des grandes batailles du passé. Le château n’a jamais subi de siège, mais n’en a pas moins joué son rôle dans les sanglantes chamailleries des rois de France et d’Angleterre.
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Aujourd’hui sujet de nos images numériques, le château était autrefois un modèle apprécié des peintres. Le musée de Bressuire détient quelques tableaux de la place forte. Elle y figure souvent environnée de champs, et plus grande qu’en réalité.
Jérôme Levitsky, responsable du musée de Bressuire et de son jumeau en chantier, le musée de Mauléon, nous guide dans la découverte des collections. Il connaît chaque objet dans les vitrines, qui mêlent harmonieusement éléments d’histoire naturelle, pièces archéologiques et œuvres d’art. C’est, en somme, un véritable cabinet de curiosités dont le conservateur feuillette pour nous le catalogue.
Le musée de Bressuire
Les amateurs de vitrail connaissent Bressuire dont Max Ingrand, « le magicien du verre », est originaire. Le musée présentera bientôt une exposition dédiée à ce maître-verrier du XXe siècle, à la fois décorateur, créateur de vitraux avec sa femme Paule et directeur artistique de firmes spécialisées dans les arts du feu. On pourra y admirer, entre autres, le splendide vitrail des Pèlerins d’Emmaüs qui compte parmi ses chefs-d’œuvre.
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En attendant son déménagement possible vers un bâtiment plus commode, le musée d’art et d’histoire occupe d’anciens greniers à grain. Une vieille et noble bâtisse qui remplit tout un côté du parvis de l’hôtel-de-ville, au centre de Bressuire. La mairie voisine contemple son reflet dans un miroir d’eau, médiocrement alimenté par des geysers au sol, certes un peu vasouilleux. Des habitants regrettent les halles à charpente métallique, âgées d’un siècle, qui se dressaient sur cette même place. On les a démolies dans les années 1970, faute d’argent pour les restaurer.
Julie me désigne des plaques de pierre sculptée, sur les galeries autour du parvis. Elles célèbrent les huit jumelages, très actifs, que Bressuire entretient avec les localités de Leixlip en Irlande, de Ryazan en Russie ou de Hodac en Roumanie. Sur les murs d’une école, des élèves ont été conviés à donner leur propre vision de ces contrées lointaines.
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La mairie et le musée sont bâtis sur un relief, comme le château. Cette deuxième colline culmine par un autre bâtiment : l’église Notre-Dame, dont le clocher gothique monte à plus de cinquante mètres et qui, de fait, loge sa silhouette à la fois élancée et trapue au point de fuite de toutes les rues.
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Des villas élégantes côtoient des immeubles sans charme et l’on surprend parfois, aux abords d’un rond-point, un pavillon Belle-Époque gâché par le trafic automobile.
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Heureusement, des havres existent pour le marcheur dont les jambes commencent à tirer. Dans une rue du centre-ville, une boutique partagée d’artisans-créateurs a ouvert, cette année. La devanture toute bleue de « La place des Arts » montre des chapeaux, des bijoux, des coussins, des objets de décoration.
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Nous poussons la porte. Les artisans qui présentent ici leur travail viennent de toute la région. Certains ont leur atelier à Bressuire, perpétuant les savoir-faire locaux. Pendant plus de mille ans, le quartier de Saint-Porchaire a abrité des potiers. Mais c’est au façonnage du cuir que Corinne Grenon, l’un des artisans exposés à « La place des Arts », a dédié le garage de sa maison, dans la banlieue de Bressuire.
Créatrice sur mesure de maroquinerie et de corseterie, Corinne nous reçoit autour d’une grande table, jonchée de patrons et de chutes de peaux.
Le petit atelier est agréable, malgré sa situation — ce garage dont, nous confie Corinne, elle espère bien « sortir un jour ». Une bougie se consume sur une étagère, des paroles de sagesse s’affichent sur les murs de moellons. Un lieu paisible et harmonieux, à l’image du nom, « Âme jumelle », choisi par la créatrice.
Nous sommes à l’est de Bressuire et dédions nos dernières foulées à une église, du même côté de la ville. C’est aussi son nom qui nous l’a fait repérer : Saint-Sauveur-de-Givre-en-Mai. Quelle histoire intrigante, quel récit fabuleux peut cacher un tel vocable ?
Un panneau nous répond, sous la forme d’une légende médiévale. En mai 732, Charles Martel arrêta les Sarrasins au nord de la Vienne. De la grande armée musulmane, il ne restait qu’un petit groupe de combattants, réfugiés dans l’église Saint-Sauveur. Ils promirent de se rendre s’il givrait le lendemain. Au petit jour, miracle ! Le givre se forma. Fidèles à leur parole, les Sarrasins déposèrent les armes. Ainsi se forgèrent l’une des plus jolies traditions et l’un des plus beaux noms du Poitou.
Le givre nous épargne, en ce doux mois d’octobre. Non la pluie dont nous sentons les premières gouttes, sur le parvis de l’église. Elle vient avec la nuit qui ternit la campagne. Il est temps de défaire nos souliers de marche.
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