L'Hôtel de Région de Bordeaux accueille l’exposition « Mémoires d’enfances exilées, histoire des Enfants dits de la Creuse », une exposition qui retrace l’histoire, encore trop méconnue, de ces enfants transférés de La Réunion à la France métropolitaine, entre 1962 et 1984.
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L'histoire des enfants réunionnais exilés
© corinne-rozotte
Du 6 décembre jusqu’au 6 janvier, l’exposition « Mémoires d’enfances exilées, histoire des Enfants dits de la Creuse » présente à Bordeaux une vingtaine de portraits réalisés par la photographe Corinne Rozotte en partenariat avec la FEDD, la fédération des enfants déracinés des DROM, départements et régions d'outre-mer. Un regard sur des enfants réunionnais exilés de force en métropole de 1962 à 1984 par le gouvernement français, dans le but de repeupler des départements victimes de l’exode rural.
Entre 1962 et 1984, ils furent 2150 enfants réunionnais exilés en métropole, à Guéret dans la Creuse, ainsi que dans 83 départements français. Ce programme, mis en place par le député de la Réunion d’alors, Michel Debré, devait contribuer au repeuplement de départements français désertés par l’exode rural. Aux familles réunionnaises choisies, pauvres et souvent illettrées, était proposé d’offrir à leurs enfants un avenir plus radieux en métropole, avec la promesse de retours réguliers au pays. Mais ils ne se sont jamais produits, et ces enfants ont été pris en charge par l’aide sociale à l’enfance - à l’époque la DDASS - puis adoptés par des familles métropolitaines.
Depuis, ces « ex-mineurs » comme ils se définissent, soutenus par plusieurs associations, Rasinn anler et Rasine kaf à La Réunion, ainsi que Les Réunionnais de la Creuse à Guéret et Couleur piment créole en métropole, se mobilisent activement réunis sous une seule et même entité créée en 2015, la FEDD. La vocation de la fédération est « d’œuvrer pour que l’histoire des enfants réunionnais exilés de force dans les années 60, 70 et 80 soit reconnue, comme d’autres grandes démocraties telles que le Royaume-Uni et l’Australie, la Suisse, la Belgique l’ont fait récemment. »
Des portraits sous forme de diptyques
Depuis 2017, la photographe Corinne Rozotte suit de près les activités de la FEDD. « C’est une relation assez émotionnelle que j’ai entretenue au sujet depuis le début, explique-t-elle. J’ai entendu parler de cette histoire en 2017, et j’ai contacté l'association afin de leur proposer de les prendre en photo. »
La même année, Corinne Rozotte se rend dans la Creuse à la rencontre de ces enfants devenus adultes. Puis, en 2018, la photographe suit un petit groupe à la Réunion. « J’ai pu assister à des rencontres comme celle d’une femme de presque 70 ans et l’une de ses sœurs qu’elle n’avait pas vue depuis son exil, à 11 ans. »
Ses portraits seront présentés sous forme de diptyques : « un portrait classique de la personne avec un élément de décor qui a trait à son enfance. » Un travail émouvant pour Valérie Andanson, présidente de la FEDD. « On voit dans nos regards que même si on a réussi à obtenir plusieurs choses (une plaque à Orly va être déposée, un lieu de ressource sera créé à Guéret ainsi qu’à La Réunion, l’histoire des enfants de la Creuse sera intégrée dans les manuels scolaires…), il y a quand même un traumatisme. » Valérie Andanson souhaite que cette exposition fasse passer un message, à travers ces images et témoignages.